Un simple coup d'œil aux gros titres aujourd'hui et tout investisseur sensé pourrait en déduire que le risque géopolitique n'a jamais été aussi élevé.
La démission de M. Trudeau, les soupçons d'ingérence de la Chine et de l'Inde dans les élections, les conflits au Moyen-Orient et en Ukraine, ainsi que les menaces répétées de droits de douane américains, témoignent d’un paysage mondial qui semble plus fragile que jamais.
En fait, les incertitudes liées aux politiques gouvernementales au Canada ont grimpé en flèche, selon une enquête basée sur des articles de presse (voir le graphique).
L'histoire nous apprend également que la simple perception d'un choc géopolitique imminent peut faire bouger les marchés avec presque autant de force que l'événement lui-même.
Bien que ces questions ne doivent pas être ignorées — et nous prenons des mesures pour y faire face — une perspective objective permet d’avoir un panorama important.
Un regard objectif
Eurasia Group, une société de conseil en risques géopolitiques basée à New York, affirme que 2025 marquera un tournant pour l'économie canadienne, car les politiques de l'administration Trump extirpent ce « parapluie de protection » américain fourni pendant des décennies. D’après un rapport du 6 janvier, « En 2025, il sera évident que nous entrons dans une nouvelle ère de la politique mondiale : un monde G-Zéro, dans lequel aucun pays ou groupe de pays ne sera disposé ou capable de diriger un programme mondial et de maintenir l'ordre international ».
Par ailleurs, des chercheurs du Peterson Institute for International Economics, un groupe de réflexion établi à Washington DC, ont conclu en 2023 que, « d'un point de vue purement quantitatif », la situation mondiale actuelle ressemble davantage aux années 1970 et 1980 qu'aux années 1930 d'avant-guerre. Des turbulences et des incertitudes, certes. Mais pas le début d'une déstabilisation mondiale.
La conclusion de Peterson se fonde sur les données de l'indice de risque géopolitique (IRG), un indicateur qui montre que le risque géopolitique de base est aujourd'hui encore assez bien en phase avec les normes historiques et qu'il n'est pas en train de monter en flèche.[i] L’IRG mesure le risque en analysant les rapports d'actualité des principales publications du monde entier, en recherchant des références à des mots clés tels que invasion, blocus, menace et activité terroriste. L'indice n'est pas infaillible, mais il mérite d'être pris en compte.
Indépendamment de la manière et du moment où ces menaces seront résolues, prendre des décisions drastiques en période de forte volatilité est rarement une réaction adaptée ou efficace à long terme.
Répercussions possibles des droits de douane
Le risque géopolitique évolue en permanence. Il a tendance à changer très rapidement, et ses répercussions sont donc plus difficiles à évaluer. Prenons, par exemple, les conséquences que les droits de douane américains pourraient avoir sur l'économie canadienne. Le niveau des droits de douane qui pourraient être imposés et les secteurs qui seront touchés suscitent beaucoup d'incertitude.
Incertitudes quant aux politiques canadiennes, selon les rapports sur l’actualité, 1985-2025

À titre d'illustration uniquement.
Source(s) : « Measuring Economic Policy Uncertainty » (Mesurer les incertitudes liées à la politique économique) par Scott Baker, Nicholas Bloom et Steven J. Davis à www.PolicyUncertainty.com.
Toutefois, nous pouvons affirmer avec certitude que les droits de douane entraîneraient probablement une baisse de la demande pour certains produits, qui à son tour, entraînerait une baisse du dollar canadien par rapport au dollar américain et pousserait alors l’inflation à la hausse. Il faut donc s'attendre à des hausses de prix sur les produits de consommation courante.
Par ailleurs, dans le cas d'un ralentissement important de la croissance du PIB, la Banque du Canada ou les autorités locales pourraient prendre des mesures de stabilisation monétaire et fiscale afin d'éviter une récession.
Agir de manière pertinente
Face à toutes ces incertitudes, nous avons réduit notre exposition aux actions canadiennes et américaines. Nous sommes désormais légèrement sous-pondérés en actions canadiennes et conservons une légère surpondération en actions américaines. Une guerre commerciale nuira aux deux pays, mais le Canada est plus vulnérable en raison de sa grande dépendance à l'égard des États-Unis. Le produit de nos ventes a été alloué à des titres à revenu fixe en prévision d'un ralentissement au Canada. Nous avons également augmenté la pondération en liquidités pour protéger le portefeuille de la volatilité anticipée sur les marchés financiers.
Notre détermination à constituer un portefeuille équilibré et diversifié à l'échelle mondiale n'a pas changé. Une palette d'actions et d'obligations réparties dans différentes zones géographiques peut permettre d'atténuer les effets de chocs économiques localisés. Les obligations, en particulier, ont tendance à offrir de la stabilité en période de volatilité accrue des marchés boursiers, ce qui renforce l’importance d’une stratégie de placement bien structurée.
Nous veillerons toujours à surveiller l'ensemble de ces risques géopolitiques et, le cas échéant, à adapter notre approche.
1. « Récentes » mesures de l’indicateur de risque géopolitique Février 2025, disponible à https://www.matteoiacoviello.com/gpr.htm