La friction a toujours été considérée comme un obstacle empêchant les choses d’aller plus vite et plus haut ou d’être plus fluides. Dans le monde numérique d’aujourd’hui, cet obstacle est presque chose du passé puisque notre expérience en ligne est conçue pour être rapide, facile et intuitive. Dans ce monde sans friction, on estime que des milliards de dollars sont dépensés pour payer des esprits brillants afin de « réduire le nombre de millisecondes qui séparent nos désirs de leur réalisation1 ». Pensez à la vitesse à laquelle on peut publier un gazouillis, répondre à un courriel, lire un message texte, consulter une publication sur Instagram, ou acheter la dernière chose en vogue. Il n’y a pratiquement rien qui nous retient.
Par exemple, le magazine Wired rapporte que plus de 88 % des Américains ont déclaré faire des achats impulsifs en ligne, dépensant 81,75 $ chaque fois en moyenne, et que 20 % d’entre eux ont affirmé récidiver chaque semaine2. Faites le calcul : ce sont des montants importants. Une autre recherche démontre que les achats impulsifs représentent presque 40 % de tout l’argent dépensé dans les achats en ligne3
Est-ce qu’on peut s’attendre à une vitesse fulgurante à l’avenir? Pas nécessairement. Les sociétés apprennent, par exemple, que les gens associent temps et confiance lorsqu’ils prennent certaines décisions d’achat. Les consommateurs se sont montrés méfiants à l’égard des moteurs de recherche de prêts hypothécaires et de forfaits de téléphonie cellulaire qui génèrent des réponses en une fraction de seconde. Les gens jugent que trop peu de temps s’est écoulé pour une analyse digne de confiance. Par conséquent, certaines sociétés rallongent stratégiquement le temps du processus afin qu’il corresponde aux attentes des consommateurs4.
De nouvelles applications, telles que « Space » ou « Time: Defeat Distraction » sont conçues pour empêcher de succomber à l’envie irrépressible de passer d’une application à l’autre. L’accent est mis sur les pauses pour laisser la place au doute.
Il y a plusieurs décennies, le philosophe canadien, Marshall McLuhan, a écrit : « Nos façonnons nos outils, puis nos outils nos façonnent5 ». Il sera intéressant de voir si, en pleine période d’essor des capacités incroyables en matière d’information et de gain de temps, le souhait d’un monde plus frictionnel grandira.
NOTES:
1 Ezra Klein, « The case for slowing everything down a bit »,Vox, 19 novembre 2018, https://www.vox.com/technology/2018/11/19/18101274/google-alphabet-facebook-twitter-addiction-speed.
2 Zohar Lazar, « We Need Software to Help Us Slow Down, Not Speed Up, », Wired, 28 août 2018, https://www.wired.com/story/software-to-help-us-slow-down-not-speed-up.
3 Khalid Saleh, « The State of Impulse Buying Persona – Statistics and Trends, » Invespro, https://www.invespcro.com/blog/impulse-buying.
4 Mark Wilson, « The UX Secret That Will Ruin Apps For You, » Fast Company, 6 juillet 2016, https://www.fastcompany.com/3061519/the-ux-secret-that-will-ruin-apps-for-you.
5 Marshall McLuhan, « We become what we behold. We shape our tools and then our tools shape us. » Brainyquotes, https://www.brainyquote.com/quotes/marshall_mcluhan_14111